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Casa Jorn, Albissola Marina

Depuis l’exposition Die Welt als Labyrinth qui s’est tenu en 2017 au MAMCO, le musée de Genève a tissé des liens avec la Casa Jorn, le musée dédié à Asger Jorn à Albissola Marina, sur la côte ligure. Les deux musées collaborent de nouveau pour réaliser un projet intitulé BALLARD IN ALBISOLA. Fidèle à l’esprit du lieu – la Casa Jorn fut la maison et l’atelier de l’artiste qui y réalisa de nombreuses expérimentations collectives – le projet prend la forme d’une résidence sur place suivie d’une exposition. Une dizaine d’artistes, curateurs et vidéastes ont ainsi été invités à résider une dizaine de jours durant le mois d’août pour y produire des pièces spécifiques. A cela s’ajoutent des œuvres issues des collections publiques genevoises et du MAMCO en particulier.

La Casa Jorn désigne une maison et son jardin élaborés intégralement par Asger Jorn et son ami Umberto Gambetta sur les hauteurs d’Albissola Marina (également orthographié Albisola), en Ligurie. Echafaudé selon les principes spontanéistes de Jorn, le lieu comprend des sculptures, des peintures, des mosaïques réalisées avec des résidus en tout genre. Guy Debord lui a consacré un texte en 1974 intitulé « L’architecture sauvage » : il voit dans la construction l’exemple le plus abouti de ce que serait une architecture situationniste, et conclut : « Dans cette habitation italienne, mettant une fois de plus la main à la pâte, Jorn montre comment, aussi sur cette question concrète de notre appropriation de l'espace, chacun pourra entreprendre de reconstruire autour de lui la Terre qui en a bien besoin. » 

  Albisola est une station balnéaire réputée pour ses ateliers de céramique. Marinetti ou Fontana y ont entre autres réalisé un certain nombre de travaux. C’est à Albisola encore que Jorn a organisé les premières manifestations du Bauhaus Imaginiste dès 1954, invitant des artistes de toute l’Europe, dont Karel Appel, Matta ou Corneille, à expérimenter avec la terre, dans une perspective critique du fonctionnalisme que développe au même moment le nouveau Bauhaus de Max Bill. 

Pour se rendre à Albisola, on emprunte « l’autoroute des fleurs » reliant Vintimille à Gênes. Construite dans les années 1970, c’est une autoroute sinueuse qui se déploie en une succession de tunnels et de viaducs à flancs de falaise. Un tronçon de 113 km est ainsi constitué à 60 % d’ouvrages d’art, comprenant 67 tunnels et 90 ponts. C’est sur cette autoroute, à une quarantaine de kilomètres d’Albisola, que se trouve le pont Morandi, dont les tragiques images de l’écroulement ont inondé les médias en 2018. Depuis lors, de vastes travaux de restauration de ces autoroutes ont été entrepris, compliquant l’accès à la côte ligure. 

  Au début des années 1970, tandis que Jorn construisait sa maison et que l’on inaugurait les premiers tronçons de l’autoroute, le romancier J. G. Ballard terminait sa trilogie de béton, trois courts romans qui demeurent les plus célèbres écrits par le Britannique. Deux d’entre eux, Crash et IGH, furent adaptés au cinéma avec des fortunes diverses. Personne en revanche n’a encore osé s’emparer du troisième, Concrete Island, qui prend les contours d’une « robinsonnade » urbaine. A la suite d’une sortie de route, Maitland, le héros, est projeté dans une terrain vague perdu en contrebas des échangeurs d’autoroutes. Complètement isolé du reste du monde, il n’a d’autre choix pour survivre que de recréer ses conditions d’existence à partir des débris rejetés par la société de consommation.  

  Concrete Island constitue l’arrière-fond de BALLARD IN ALBISOLA. Il y a en effet une similitude narrative dans la fiction de Ballard et la construction de la maison ligure : bricoler un monde en contrebas d’une autoroute. Mais au-delà, l’évocation du roman dans ce contexte suscite un certain nombre de principes, de l’ordre du collage contradictoire : envisager le béton au pays de la céramique, amener une zone urbaine dans une station balnéaire, tourner le dos à la mer pour regarder l’autoroute, faire jouer un « roman d’anticipation du présent » (ainsi que fut décrit Concrete Island) dans « une sorte de Pompéi inversé » (pour reprendre encore les mots de Debord sur la Casa Jorn). 

Avec : Pierre-Olivier Arnaud, Stéphanie Cherpin, Beatrice Delcorde, David Evrard, Claire FitzGerald, Jill Gasparina, Federico Nicolao, Julie Portier, Denis Savary, Ambroise Tièche, Sarah Tritz

Et les œuvres de : Angela Bulloch, Guy de Cointet et Robert Whilite, Liam Gillick, Dominique Gonzalez-Foerster, Gordon Matta-Clark, Eduardo Paolozzi, Philippe Parreno

  • Le projet était organisé par Paul Bernard, Cyane Findji, Luca Bochicchio, Stella Catteneo et Daniele Pannucci
  • Avec le soutien de la Comune di Albissola Marina, Les Amis du MAMCO, Fonds d’art contemporain de la ville de Genève, Fonds cantonal d’art contemporain, Genève, Centre national des arts plastiques, Wallonie-Bruxelles International, Fédération Wallonie-Bruxelles
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