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Cette exposition réunissait deux séries d’œuvres que Jim Shaw (*1953), actif au sein de la scène de Los Angeles depuis le début des années 1980, entreprend dans la première décennie de sa carrière. My Mirage (1986-1990) est un ensemble de 170 œuvres interconnectées, même si chacune est dessinée, peinte, sérigraphiée, photographiée, écrite, sculptée, animée ou filmée dans un style différent. Construit sur le modèle d’un « roman d’apprentissage », le cycle de My Mirage comprend plusieurs chapitres. Chaque œuvre retravaille une image extraite d’un champ iconographique aussi large que varié : il s’étend de l’art conceptuel à la peinture de brocante, en passant par à peu près tout ce qui peut se trouver entre ces deux pôles – littérature pour enfants, bandes dessinées, magazines d’information, journaux régionaux, affiches de concerts de rock psychédélique, annuaires estudiantins, etc. L’ensemble raconte l’histoire d’un personnage, Billy, issu de la classe moyenne américaine blanche et perdu dans le maëlstrom sociétal des années 1960 et 1970. Son histoire est celle d’échecs répétés, d’une quête futile et innocente de sens. Nous rencontrons d’abord Billy comme enfant anxieux de comprendre le monde qui l’entoure ; nous le voyons ensuite se débattre avec les spasmes chargés de culpabilité de l’adolescence, avant de se perdre dans une forme d’utopie psychédélique qui vire rapidement au cauchemar. Au plus profond de ses hallucinations psychotiques, nous le voyons alors suivre une femme qu’il va vénérer au sein d’un culte païen. Finalement, il reviendra à la religion de sa jeunesse, « renaissant » comme Chrétien fondamentaliste.

L’autre série, Dream (1991-1999), comprend deux ensembles reliés : les Dream Drawings (dessins de rêve), une planche de bande dessinée dans laquelle l’artiste illustre ses rêves et la pléthore d’objets et de personnages qu’il y rencontre ; et les Dream Objects (objets de rêve), qui sont des réalisations tridimensionnelles de certaines de ces chimères. Si ces œuvres semblent être le produit d’hallucinations, elles sont pourtant très éloignées de l’héritage du Surréalisme européen. Aucune intention de révéler les états intérieurs de l’âme ou de la psyché ne règne ici. Pour Shaw, les rêves sont avant tout des amalgames, des machines d’accrétion de sources hétérogènes, de moments d’une histoire personnelle et de fragments de l’histoire culturelle collective. Radicalement non-psychanalytiques, ces œuvres réécrivent l’Histoire depuis le point de vue d’un artiste, en tant que sujet adulte blanc, issu de la classe moyenne américaine et vivant la dernière décennie du vingtième siècle, une époque qui a naturalisé et neutralisé les aspirations de la contre-culture. Les Dream Objects sont ainsi autant d’accessoires d’un théâtre de la morale, dans l’ombre de laquelle nous continuons à nous tenir.

  • L’exposition était organisée par Lionel Bovier à partir d’œuvres de la collection du musée et de prêts de collections genevoises
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