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« Dans les récits récents de science-fiction, des objets de grande taille planent silencieusement au-dessus des villes ou sur l'orbite terrestre. » Ainsi commence l’essai intitulé Objects in the Sky publié en 2019 par Mathis Gasser. Dans la suite de ce texte, l’artiste s’attache à mettre en relation l’apparition récurrente de ces objets célestes dans les fictions populaires avec la crise financière de 2007-2008, arguant que les OIS (« Objects in the Sky ») constituent des outils culturels de visualisation d’un pouvoir financier par ailleurs largement invisible et abstrait. Son analyse détaille leurs formes, qu’il aborde à travers une série d’analogues – la matrice utérine, la bulle, la tumeur –, autant d’allégories de rapports possibles à la production de valeur économique. Ce texte est à l’origine de l’exposition de l’artiste présentée cet été au MAMCO, consacrée, précisément, à ces objets célestes et à la place qu’ils occupent dans son œuvre. 

L’exposition prenait également pour point de départ un principe formel : celui de l’inventaire et de la planche naturaliste, principe qui gouverne une œuvre de 2017 intitulée Inhabitants (After DirkLoechel). Dans cette peinture de grand format, Gasser reproduisait le tableau comparatif des vaisseaux spatiaux de fiction réalisés par l’artiste Dirk Loechel (une image qui fit le tour de web en 2015). Pour l’exposition, il présentait justement une série de nouvelles peintures d’inventaires en écho à Inhabitants. Ces dernières permettent d’aborder la méthode de travail de l’artiste dans la lignée des « appropriationnistes ». Gasser collecte en effet des images issues du cinéma, de la science-fiction, des séries TV, de l’art conceptuel, des jeux vidéo, de la communication spatiale (images NASA ou ESA) ou d’imprimés (posters, affiches) qui constituent la base de son travail pictural. Certaines images sont reproduites telles qu’elles, d’autres donnent lieu à des recompositions. A cet égard, Gasser peut presque être considéré comme un « peintre conceptuel » qui, à la manière d’Allen Ruppersberg, archive et réagence des éléments Pop : c’est un naturaliste de la culture populaire.

Le travail de collage, plus libre dans son rapport aux sources, ouvre également d’autres pistes de lecture. En mêlant images documentaires et fictionnelles, en associant des images d’OIS avec des navires, des architectures ou des paysages historiques, l’artiste aborde aussi la question de la conquête spatiale avec un sous-texte qui est celui des études post-coloniales : l’exploration spatiale est-elle une redite de la colonisation ? Jusqu’à quel point la figure de l’envahisseur « alien » peut-elle être comprise à travers le spectre de politiques migratoires néo-libérales actuelles, de l’histoire de la globalisation et des organisations politiques internationales ? 

  • Exposition organisée par Jill Gasparina
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