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Julia Wachtel (*1956, New York) fait partie d’une génération d’artistes qui s’intéresse aux représentations véhiculées par la société de consommation et aux transformations que l’image subit depuis le développement des médias de masse. Cette « Pictures Generation » (du nom de l’exposition de Douglas Crimp à New York en 1977 et de la manifestation qui s’y référait au Met, en 2009), prend acte d’un nouveau régime de l’image depuis la consécration du Pop Art et des stratégies de diffusion d’Andy Warhol, tout comme elle analyse les processus d’appropriation d’un langage autrefois considéré comme artistique (à l’instar du Surréalisme, par exemple) par la publicité et la communication. A son tour, elle va utiliser la copie, le déplacement et la citation pour contrer ces processus et se ré-approprier le domaine de la représentation.

Au sein de cette génération, qui réunit des artistes tels que Sherrie Levine, Jack Goldstein, Troy Brauntuch, Peter Nagy, Robert Longo, mais aussi Dara Birnbaum, Gretchen Bender ou Sarah Charlesworth, différentes sensibilités co-existent. L’une d’entre elles va se manifester dans une exposition de 1985 intitulée Infotainment, signalant la dissolution de l’information dans le divertissement, que l’un de ses organisateurs, David Robbins qualifiait ainsi : « aux enfants de Barthes et du Coca-Cola, la télévision offrait l’opportunité de surveiller l’évolution de la société de consommation depuis nos chambres à coucher ». Pour Bob Nickas, l’un des critiques qui a le mieux observé cette époque, la contribution de Julia Wachtel à cette exposition – un ensemble de posters de célébrités sur lesquels apparaissent des silhouettes telles des ombres projetées des spectateurs – en est une des incarnations les plus efficaces. 

Dès 1986, avec la série « Emotional Appeal », Julia Wachtel choisit d’adopter le format classique du tableau et une technique picturale qui combine émulsion vinylique (Flashe), sérigraphie ou laque et peinture à l’huile pour ses « ré-appropriations » d’images issues de magazines, de la publicité ou de cartes de vœux populaires. Elle combine alors, dans des compositions qui se développent horizontalement comme une séquence filmique, des reproductions photographiques et des représentations de personnages de « cartoons ». Des œuvres telles que You Disappear Me et Driven by Symmetry, qui appartiennent à la série « Celebrity » commencée en 1987, se déploient ainsi sur quatre panneaux, comme pour amorcer une narration et font subir aux images de célébrités plusieurs types d’inversions (gauche-droite, positif-négatif). L’image répétée de Lena Olin dans l’Insoutenable légèreté de l’être de Philip Kaufman (à partir du roman de Milan Kundera), entourée de deux peintures figurant un personnage enfantin, devient ainsi l’emblème d’une version Pop du stade du miroir lacanien. Le pirate édenté de l’autre polyptique, lui aussi peint à l’huile, semble être le témoin oculaire et désirant des métamorphoses du costume de scène de Cher en lingerie. Par la juxtaposition et la manipulation d’images, Julia Wachtel invite donc à porter un regard critique sur ce que ces représentations véhiculent. Elle nous rappelle ainsi que, du point de vue de l’histoire de l’art, l’appropriation opère une transformation importante du geste moderne du collage, mais continue de croire à son pouvoir révélateur. Et que l’artiste, de productrice d’images est devenue éditrice de celles-ci.

  • Organisée par Lionel Bovier
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