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Vidya Gastaldon et Jean-Michel Wicker débutent leur collaboration à l’issue de leurs études communes à l’Ecole des Beaux-Arts de Grenoble et la développent tout au long des années 1990. Ensemble, ils s’emparent de médiums aussi divers que la vidéo, le dessin, la performance, l’imprimé ou la sculpture textile. Cette exposition s’articule autour d’une donation des artistes au MAMCO constituée d’une vingtaine d’œuvres sur papier et de plusieurs installations.

Les dessins, datés entre 1994 et 1996, sont les œuvres les plus anciennes de cette présentation. Se côtoient sur ces feuilles, des slogans et des marques, des noms et des listes, des figures et des paysages, des étoiles, des crânes, des cactus, des abeilles, etc. La liste des matériaux est tout aussi variée : autocollants, collages, feutres, crayons de couleurs, peinture, stylo à bille, « glitter », etc. Chacun des éléments constitutifs conserve ainsi une matérialité et une identité propres et les dessins interagissent les uns avec les autres sans jamais être englobés par une composition d’ensemble. Cette sensation d’éclatement tient autant à un programme esthétique commun qu’à la manière dont les œuvres ont été réalisées. Vidya Gastaldon et Jean-Michel Wicker commencent en effet individuellement chaque dessin, puis se passent et se repassent les feuilles afin que l’autre puisse rajouter à sa guise des éléments, souligner ou transformer ce qui existe déjà. Ces œuvres peuvent ainsi être regardées comme autant de transcriptions d’une conversation multifocale, dont le thème principal serait l’héritage des utopies psychédéliques, sa commercialisation par l’industrie du bien-être et de la mode, ainsi que la résurgence de ses promesses de libération communautaires au travers de la musique électronique et de l’esthétique de la culture « rave ». L’humour qui imprègne ce dialogue n’est pas tant ici critique ou analytique que jubilatoire et désirant. 

Le mode de production de ces œuvres est aussi porteur d’une dimension politique, car la collaboration des deux artistes ne donne pas naissance à une figure hybride ou fictionnelle d’auteur, mais reste au contraire fluide, insaisissable. Une manière de parcelliser le rôle de l’artiste que Vidya Gastaldon et Jean-Michel Wicker ne cesseront de complexifier et d’ouvrir à d’autres personnes de leur entourage, à l’instar de leurs films, réalisés avec une communauté d’artistes sans cesse recomposée, comprenant, entre autres, à Grenoble, Serge Compte et Christophe Terpan, puis, à Genève, Sidney Stucki. 

Les installations et sculptures textiles de la fin des années 1990 construisent dans l’espace un même trouble perceptuel. Politique de l’extase, 2000, dont le titre est emprunté à Timothy Leary, est une installation composée d’éléments en laine tricotée, de perles, de soie, de pompons et de colliers de pépins de melon et pastèque. Est-elle une représentation de l’infiniment petit, au sens du cellulaire, ou au contraire un modèle de l’infiniment grand, de nature géologique, voire même cosmique ? Avons-nous affaire à un réinvestissement d’enjeux formels et conceptuels hérités du post-minimalisme américain ou à un arrangement d’éléments de décoration post-hippie ? Doit-on se focaliser sur chacun de ses éléments dans leurs matérialités propres ou au contraire sur leurs interactions et la manière dont celles-ci qualifient l’espace qui les accueille ? 

La capacité de ces œuvres de susciter une telle pléthore de sensations et d’interprétations, sans jamais se laisser figer dans une posture discursive, la fluidité joyeuse qui sous-tend leur création, restent, vingt ans après leur réalisation, d’un optimisme radical.

  • Exposition organisée par Lionel Bovier
LE MAMCO TIENT À REMERCIER SES PARTENAIRES
FONDATION MAMCOÉtat de GenèveVille de GenèveJTIFondation LeenaardsFondation genevoise de bienfaisance Valeria Rossi di Montelera
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